La vie, les réalisations, le parcours, en un mot la biographie d’un personnage à part parmi ces personnages à part que sont les "himalayistes de haut niveau". Un grand au petit gabarit, une carrière de vingt ans sur les montagnes extra-européennes dont la mémoire collective de l’alpiniste moyen a la fâcheuse tendance à ne retenir (en plus de son solo victorieux au Makalu) que ses échecs répétés à l’Everest et sa mort à l’Annapurna. Bien qu’en réalité il a su gagner l’estime de ses pairs par ses qualités d’engagement, sa ténacité (obstination même !) sa discrétion et ses exploits marquants, qui ont donné lieu à la naissance du « style alpin » sur les itinéraires techniques en Himalaya. Pierre Beghin, « anxieux compulsif », était ingénieur chercheur, écrivain, conseiller technique et bien plus encore. Une boulimie intarissable l’habitait : en lisant le livre de François Carrel on a l’impression d’assister à l’agitation permanente d’un lutin survitaminé, constamment tendu vers la recherche du futur, noyé dans ses entrainements qui devaient le rassurer sur la possibilité d’accomplir ses rêves. Ceux-ci qui devenaient à chaque ascension davantage épurés, avec une éthique personnelle de plus en plus stricte et sans concessions : « aller un peu plus loin, comme toujours, légèrement au-delà du raisonnable »". L’intransigeance et l’élégance.
Édition Guérin, 2014, 427 pages, 25 €